jeudi 9 avril 2009

Je ne suis pas celle que vous croyez, je suis pire.(suite)

Depuis que je suis toute petite, ma mère m'a clairement expliqué (bourré le crâne) qu'on ne pouvait pas faire confiance aux hommes. A sa place, j'aurais fait pareil. Se retrouver seule avec un bébé sur les bras à 30 ans, ça perturbe je pense. Elle a toujours mis un point d'honneur à tout faire elle même, et ne rien demander aux autres. Elle a toujours dit que les hommes partent, sans raison. Un jour, ma mère est retombée amoureuse. Et a arrêté de s'occuper aussi bien de sa fille qu'avant. C'était sûrement une façon de me montrer qu'il fallait que j'apprenne à me débrouiller seule. En un sens pratique ça m'a servi. Je suis plus ou moins autonome pour pas mal de choses depuis longtemps. En un sens humain, moins. Elle a toujours fait passer tout avant moi à partir de là, avec l'alibi de m'aimer plus que tout, qui devait suffire à contenir ma rancœur.
Alors j'ai retrouvé quelqu'un qui voulait bien s'occuper de moi. Trop tôt je pense, mais j'en avais besoin. Je me suis mise en couple. Six ans. Il a pris soin de moi au début, promis que jamais il ne partirait, qu'on serait heureux pour toujours. (L'amour dure trois ans.) Bizarrement, ça arrangeait ma mère. Seul mon beau père avait compris le pourquoi du comment.

Mon beau père est mort. Ma mère s'est anéantie à tout jamais, me rappelant au passage que les hommes partent toujours et abandonnent sans scrupules. Je suis pas persuadée qu'on puisse pourtant lui en vouloir à lui... Il l'avait laissée là avec son malheur et ses larmes. Un de plus. J'avais perdu la seule personne qui s'occupait de moi alors qu'elle n'aurait pas eu à le faire. C'était à ma mère de faire le boulot qu'il a fait avec moi. J'ai cru qu'enfin, elle allait se lancer à corps perdu dans quelque chose, et peut être dans sa fille. Mais non, elle se laisse juste dépérir, entre dépression et whisky.

Les années passant, mon couple s'est terni. D'émerveillé, il est passé à exigeant. Et moi aussi. Je n'étais plus assez bien, tout était surfait, ma jeunesse me manquait. Il s'est montré tel qu'il était, odieux, exigeant et tyrannique. Les humiliations ont été quotidiennes, publiques, privées, intimes. Je parlais trop fort, étais trop exubérante, pas assez gentille, trop catégorique ou pas assez, je n'étais qu'une pauvre petite jeunette qui ne comprenait rien au monde autour d'elle, une pauvre conne têtue et naïve. Si aujourd'hui je peux entendre autant de poison à mon sujet, c'est à lui que je le dois. Le désir est parti aussi vite que les reproches sont arrivés, et forcément, ça en a fait un de plus. Une occasion de plus de m'engueuler, une occasion de plus de m'humilier, sans essayer de solutionner le problème. Pour ça, je pourrai le tuer aujourd'hui. Les semblants d'excuses ont toujours été discrets. Les reproches sur un deuil que j'avais du mal à faire mien s'accumulaient. C'est là que j'ai arrêté d'aimer, de l'aimer lui, et de m'aimer moi. Les engueulades perpétuelles, les moqueries, la persécution au quotidien. Il aimait l'emballage, pas l'intérieur. Il le dénigrait. Constamment. En toutes circonstances, devant tout le monde. Et j'ai fini par le croire un jour, car il était au final celui qui me connaissait le mieux. Là j'ai compris ce que disait ma mère. Les hommes finissent toujours par partir, et si ce n'est pas physiquement, c'est moralement. Par son attitude, il démissionnait de mon cœur, emportant mon amour propre avec lui. Le quitter n'a pas été simple, car ça signifiait me retrouver seule à nouveau. Et donner raison à ma mère, encore. Mais je n'avais plus le choix, je ne pouvais plus supporter toute sa méchanceté universelle, et à mon égard spécifiquement., et tant pis si ça faisait un de plus qui finissait par ne plus s'occuper de moi.
Il a mis trois mois pour récupérer ses affaires, persuadé que je retrouverai la raison, me rappelant qu'à une époque heureuse, on avait parlé maison, mariage, bébé... Je ne construirai pas un foyer bancal, comme ma mère. De fait, je ne construirai pas de foyer.

J'aimais ce que l'homme parfait et différent avait fait de moi. Il m'avait fait oublier que certains gens sont juste méchants. j'amais cette nouvelle vision que j'avais. J'aimais celle que j'étais devenue. Je l'aimais.

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